17.12.2019 - Motion relative à l'engagement de Watermael-Boitsfort contre les violences faites aux femmes et pour la reconnaissance du féminicide

Le Conseil communal,

Vu a Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique dite « Convention d’Istanbul » ratifié par la Belgique le 14 mars 2016 ;

Vu la circulaire entrée en vigueur en 2006, révisée en 2015 relative à la politique criminelle en matière de violence dans le couple, autrement appelée la circulaire de « Tolérance Zero » ;

Considérant que la Convention d’Istanbul est contraignante et que la Belgique est tenue de mettre en application ses dispositions ;

Considérant que la Convention d’Istanbul définit la violence à l’égard des femmes comme une violation des droits de l’Homme et une discrimination de genre ;

Considérant la nécessité de coordonner l’action des différents niveaux de pouvoirs en Belgique en vue de lutter efficacement contre la violence domestique et le féminicide ;

Considérant que la commune de Watermael-Boitsfort doit participer à l’application de cette convention ;

Considérant que la violence à l’égard des femmes et des filles constitue aujourd’hui selon l’ONU « l’une des violations des droits de l’Homme les plus répandues, les plus persistantes et les plus dévastatrices dans le monde » ;

Considérant que le plan d’action national (PAN) contre les violences basées sur le genre associant l’Etat fédéral, les Communautés et les Régions 2015-2109 n’a pas encore été renouvelé ;

Considérant qu’en 2018 en Belgique francophone, plus de 9.000 appels ont été traités par la plateforme « Écoute violences conjugales » ;

Considérant que de nombreux cas de violences ne se retrouvent pas dans les statistiques ;

Considérant que le féminicide est défini comme suit : « le meurtre d'une ou plusieurs femmes ou filles en raison de leur condition féminine » ;

Considérant que le féminicide n’est toujours pas reconnu dans le code pénal belge malgré des demandes répétées des associations de lutte contre les violences faîtes aux femmes ;

Considérant que selon un recensement associatif, il y aurait eu 1 féminicide tous les 10 jours en Belgique en 2018 ;

Considérant qu’il n’y a toujours pas de recensement officiel des féminicides en Belgique, alors qu’il s’agit d’une obligation découlant de la Convention d’istanbul ;

Considérant qu’il convient de lutter contre la banalisation des violences mais aussi contre le phénomène de « victimisation secondaire »[1] encore présent au sein des services et institutions auxquelles fait appel une femme victime de violences ;
Considérant que le 25 novembre est la journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes et qu’il y a lieu de donner un signal fort lors de cette journée ;

LE CONSEIL COMMUNAL DE WATERMAEL-BOITSFORT DÉCIDE :

Article 1

De demander au collège :

  • de devenir précurseur dans la prévention et la lutte contre les violences faites aux femmes en présentant notamment au conseil communal un plan d’application de la convention d’Istanbul au niveau local ;
  • de créer une compétence scabinale relative aux droits des femmes ;
  • de mettre en place des formations pour les gardiens de la paix afin de les sensibiliser et de les former sur le sujet du harcèlement de rue. A terme, de sensibiliser l’ensemble de nos agents communaux au harcèlement ;
  • de demander aux écoles de sensibiliser, dans le cadre de l’éducation à la vie, relationnelle, affective et sexuelle (EVRAS), les élèves à la question des violences faites aux femmes ;
  • de promouvoir des événements (expositions, débats, colloques…) dans les lieux culturels, les écoles, les administrations ou les lieux de grands passages de la commune afin de sensibiliser largement à cette problématique ;
  • de dédier, dans le respect des personnes, l’espace d’un mur, dans un lieu emblématique de Watermael-Boitsfort, aux histoires de femmes victimes de violences conjugales, afin de les sortir de l’anonymat ;
  • de renforcer la visibilité de toutes les initiatives mises en place au niveau local (SAPV, CEFAS, CPCF, planning familial…) notamment via des affichages spécifiques sur les panneaux d'affichage locaux, dans les centres culturels, les bibliothèques, les maisons de quartiers et le PCS.
  • de mettre symboliquement en berne le drapeau communal les 25 novembre en souvenir des femmes victimes de féminicides en Belgique et dans le monde ;

Article 2

De demander au Bourgmestre, membre du collège de Police, ainsi qu’aux conseiller.ère.s communaux qui sont également conseiller.ère.s de Police de travailler sur l’application de la convention d’Istanbul dans notre zone de Police, et de veiller à la sensibilisation de nos agents de police à la lutte contre les violences faites aux femmes, notamment dans une optique d’augmenter de manière importante l’enregistrement des plaintes.

Article 3

De demander à l’ensemble des niveaux de pouvoir compétents de mettre en œuvre des politiques nationales effectives, globales et coordonnées, incluant toutes les mesures pertinentes pour prévenir et combattre toutes les formes de violence couvertes par le champ d’application de la Convention d'Istanbul, et d’offrir ainsi une réponse globale à la violence à l’égard des femmes ;

D’inviter le Parlement fédéral à adopter rapidement à un arsenal juridique ambitieux de lutte contre les violences faîtes aux femmes à l’instar de celui développé en Espagne et à reconnaître le féminicide dans le code pénal ;

De demander au gouvernement fédéral :

  • de désigner un organe de coordination pour ce qui concerne la politique contre les violences faites aux femmes ou, à défaut, de mettre sur pied une conférence interministérielle regroupant tous les niveaux de pouvoir ;
  • de pérenniser et d’élargir les moyens des centres multidisciplinaires actives dans ce domaine afin de répondre aux besoins et de généraliser ces centres compte tenu de leurs bons résultats en terme de dépôt de plainte ;
  • de prolonger sa politique de lutte contre les violences basées sur le genre à travers la rédaction d’un nouveau plan d’action national (PAN) associant l’Etat fédéral, les Communautés et les Régions pour 2020-2024 ;
  • d'insérer prioritairement la lutte contre les violences faites aux femmes dans la prochaine note-cadre de sécurité intégrale, ainsi que dans le prochain plan national de sécurité, en les accompagnant des moyens supplémentaires.

Le Conseil communal demande au Collège du Bourgmestre et des échevins de transmettre cette motion au Parlement Fédéral, au Parlement Régional Bruxellois, au Parlement Flamand, au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, à la Première Ministre, au Ministre de la Justice, au Ministre-Président Bruxellois, à la Secrétaire d’Etat bruxelloise à l’Égalité des chances, au Ministre-Président de la Fédération Wallonie Bruxelles, à la Ministre des Droits des Femmes, au collège et conseil de Police de la Zone Uccle/Watermael-Boitsfort/Auderghem.


[1] réactions négatives envers la victime d'une agression de la part des personnes à qui elle parle de l'agression, se confie ou demande de l'aide.